L’Agence Nationale de Protection Civile (Anpc) a organisé avec l’appui du Système des Nations Unies (SNU), du 06 au 10 aout à l’hôtel Bel Azur de Grand Popo, un atelier sur l’élaboration de l’avant-projet de stratégie nationale de mise en œuvre du cadre d’action de Sendaï et l’actualisation du Plan de Contingence National (Pcn). A l’issue des travaux, le Directeur Général de l’Anpc, le Commissaire Divisionnaire de Police Aristide Dagou, fait le point des travaux principalement au sujet de l’actualisation du Plan de Contingence NationalMonsieur le Directeur Général de l’Agence Nationale de Protection Civile, vous avez réuni à Grand-Popo, les acteurs de la plateforme nationale de réduction de risques de catastrophes pour l’actualisation du Plan de Contingence National. L’exercice se fait de façon annuelle. Pourquoi se voit-on obligé de procéder chaque année à l’actualisation du plan de contingence national ?
Je crois que je vais citer Sénèque qui dit ‘’il n’y a pas de vent favorable à celui qui ne sait où il va ‘’. Cela veut dire qu’il faut attacher du pris à la planification, il faut anticiper ainsi lorsque la catastrophe survient on ne perdra plus du temps à réfléchir à ce qu’on doit faire. Universellement, il est retenu que tous les pays du monde entier actualisent leur plan de contingence chaque année. Le plan de contingence est un outil de planification qui permet à l’Etat de savoir en cas de catastrophe les moyens dont il dispose. Deuxièmement de savoir quels sont les besoins urgents pour pouvoir répondre à cette catastrophe. Il faut faire le point par an pour savoir quels sont les ressources dont nous disposons pour répondre en vivre en non vivre et voir le gap afin que lorsque la catastrophe survient, que les structures ne se mettent pas à faire la même chose. Par exemple si vous avez une catastrophe, alors que dans les magasins il n’y a que les tentes et que tout le monde continue à acheter des tentes alors que c’est plutôt des médicaments qu’il faut en priorité, il y a problème. C’est pour cela que nous asseyons pour voir les réserves de stock dont dispose chaque structure que ce soit au niveau du Ministère de la santé, de l’ANPC, du Ministère de l’agriculture, de la FAO pour voir de quoi nous aurions besoin. Ainsi quand la catastrophe va survenir, chaque acteur pourra contribuer à répondre de façon efficiente sans qu’il n’y ait double emploi. L’autre chose c’est qu’il y a le dérèglement climatique. Lorsque nous faisons l’exercice, nous voyons les faits nouveaux qui sont apparus et comment nous pouvons apporter une réponse appropriée auxdits faits. Par exemple lorsque vous prenez le plan de contingence de l’année dernière, la pollution marine n’est pas traitée de la même manière. Cette année, nous l’avons abordée autrement parce qu’il y a un plan de production marine qui a été actualisé récemment avec notre contribution. Nous avons tenu compte de ces données nouvelles et nous avons appelé l’attention des autorités communales de Sèmè-Podji sur le danger afin qu’elles se préparent autrement. Cela transparait dans le plan de contingence national. En ce moment, nous vivons un drame dans le nord du pays où un affrontement intercommunautaire a fait 7 morts pour le moment et des milliers de personnes déplacées internes. Nous continuons de gérer cette situation. Il faut apporter des réponses structurelles à des situations du genre pour pouvoir les prévenir pour ne pas avoir toujours à dépenser. Le gouvernement du nouveau départ ambitionne donc de faire de la protection civile un levier de développement. L’objectif c’est de parvenir à un changement de paradigme pour ne plus être obligé de porter assistance en cas de catastrophe mais les prévenir en amont pour pouvoir orienter les fonds vers le développement puisque les études ont montré que nous dépensons sept fois plus lorsque nous laissons la catastrophe survenir avant de répondre. Donc, si nous prenons les dispositions pour aller vers les populations, les sensibiliser, les éduquer, les former à pouvoir contribuer à la réduction de risque de catastrophe, nous ferons des économies. Voilà la vision du gouvernement et l’actualisation du plan de contingence national chaque année participe à cette vision.
A vous suivre on comprend que le plan de contingence national est un document programmatique dynamique
Exactement. C’est très dynamique. Ce n’est pas un document figé. Il arrive même qu’en pleine échéance, la plateforme soit amenée à notre invitation, à s’assoir pour réviser, pour relire ce plan de contingence compte tenu des faits nouveaux qui s’imposent. Au Bénin, nous n’avons pas jusque-là des séismes mais il y a eu quelques secousses. Mais de plus en plus cela se répète. On doit réfléchir à cela. Quand nous prenons l’érosion côtière dans la ville de Grand-Popo, c’est un sujet d’actualité. Les populations sont obligées de se déplacer. Mais qu’est-ce que nous faisons pour l’année prochaine ? L’actualisation du plan de contingence vise à trouver des solutions à ces genres de questions parce que nous avons au Bénin plusieurs aléas qui n’ont pas les mêmes probabilités d’occurrence. Lorsque nous nous réunissons, nous voyons suivant des méthodes scientifiques, les aléas qui sont dominants qui sont les plus probables et nous hiérarchisons.
Quels sont ces aléas ?
Au Bénin pour l’année 2017, les inondations sont les aléas les plus probables qui occupent la première place. Cette année cela n’a pas changé. Mais ce qui a de nouveau, c’est que les incendies qui n’étaient pas dans les quatre premiers aléas sont maintenant présents. Cela veut dire que les places ne sont pas les mêmes, l’hiérarchisation change et nous devons en tenir compte lorsque nous apportons des réponses. Nous avons aussi les épidémies surtout dans un contexte où la fièvre hémorragique à virus Ebola est revenue dans certains pays. Les populations se déplacent quotidiennement et nos frontières sont poreuses. On ne va pas attendre que cela se déclare chez nous avant de réagir. Il faut intégrer ces données dans la programmation. La surveillance se fait certes aux frontières mais il faut reconnaitre que des situations peuvent nous échapper à ce niveau et il faudra déjà penser à la riposte le cas échéant. C’est donc important que l’actualisation se fasse en tenant compte des évolutions des aléas dans le temps.
Est-ce que dans ce travail vous avez pu revoir le système d’alerte ?
Nous avons revu tout cela. C’est l’occasion pour moi de lancer un appel à nos partenaires notamment ceux qui ont financé le projet système d’alerte précoce qui est arrivé à son terme l’année passée. Nous avons fait une requête pour que cela soit renouvelé, l’étude suit son cours et nous plaidons pour que cela aboutisse favorablement par ce qu’il est très important que nous développions ces systèmes d’alerte précoce. Ce sont ces systèmes qui annihilent l’effet de surprise au sein des populations et qui permettent aux gouvernants de prendre rapidement les dispositions afin de minimiser les dégâts. Nous ne pouvons rien faire vraiment pour que les catastrophes ne surviennent pas, mais il est de notre responsabilité de prendre les mesures pour minimiser ces dégâts surtout ceux de pertes en vies humaines et économiques. Nous avons passé cette question en revu et de plus en plus nous évoluons vers des systèmes d’alerte précoce multirisques qui prend donc en compte désormais plusieurs aléas et non un seul pour développer le mécanisme car il peut avoir une concomitance entre l’occurrence de ces aléas.
Pour conclure cet entretien
Je remercie le gouvernement qui est vraiment engagé dans la réduction de risque de catastrophe. C’est un gouvernement qui a compris que réellement les efforts qui sont faits dans la sécurité publique ne seront pas sauvegardés si la protection civile, la réduction des risques de catastrophe n’est pas prise en compte au même niveau. Cela mérite d’être souligné car le gouvernement a donné un nouvel essor à la protection civile au Bénin, en donnant les moyens autant que faire se peut et aussi en accompagnant ceux qui dirigent le secteur pour que notre pays soit comme nous le sommes dans bien d’autres domaines, un pays model dans le domaine de réduction de risque de catastrophe. Je voudrais remercier ensuite le Système des Nations Unies qui accompagne le gouvernement dans ses efforts. Mais l’appel que je veux lancer c’est à l’endroit du citoyen. Il faut que le citoyen comprenne qu’il est l’acteur principal de réduction de risque de catastrophe car tout ce que nous développons comme instruments, c’est à lui que cela s’applique. C’est lui qui est au centre et c’est encore lui qui doit respecter les textes et inviter ses paires à faire autant. Il y a beaucoup de catastrophes que nous pouvons éviter si nous nous comportons bien. Notre premier objectif est donc de réduire sensiblement les catastrophes anthropiques, c’est-à-dire les catastrophes qui sont dues au comportement humain, les accidents de route par exemple qui occasionnent des milliers de morts.
Propos recueilli par Patrice SOGLO